DOSSIER DE PRESSE

Faites « l'humour », pas la guerre !

par Isabelle Maréchal
2014-12-07

La perspective d'un Noël frugal et les cadeaux empoisonnés de notre gouvernement ont-ils complètement sapé notre moral? Où est passé ce rire franc et sincère qui nous caractérise? Toujours est-il que «l'affaire Sugar Sammy», appelons-la ainsi puisque c'est bel et bien devenu un cas médiatisé, a donné l'occasion à quelques indépendantistes un peu tendus de prouver que le sens de l'humour n'est pas donné à tout le monde.

Là où ça dépasse les bornes, c'est quand certains esprits échauffés essaient de jouer aux comiques. Après avoir proféré leurs messages haineux sur les réseaux sociaux, ils ont menacé de s'en prendre à l'humoriste qui a dû faire appel à la police. à Sherbrooke, Sugar Sammy a préféré annuler la séance d'autographes prévue après le spectacle. On le comprend. Il y a des limites à se faire traiter de tous les noms et en particulier de «clown fédéral», la dernière trouvaille.

Sucré, salé

Sugar Sammy ridiculise notre identité nationale, affirment sans rire ses détracteurs qui n'ont pas apprécié sa façon de promouvoir ses spectacles. «Pour Noël, j'aimerais recevoir une plainte de l'Office québécois de la langue française», disait la pub en anglais. Un bon flash de l'agence Sid Lee, qui a misé sur le côté bilingue baveux de l'humoriste.

Mais aux yeux des patriotes, on ne badi­ne pas avec le Québec français. «Il viole les lois et les institutions de la société québécoise», a écrit un de ceux qui se sont plaints à l'OQLF. «Il crache au visage des francophones», a pesté la Société Saint-Jean-Baptiste, qui tente aujourd'hui de calmer les esprits et dénon­ce les menaces. Même mon ami Mathieu Bock-Côté y voit de l'humour politique. Qu'en pense Yvon Deschamps?

Que Sugar Sammy s'amuse de notre nationalisme comme d'une plaie ouverte toujours prête à saigner, sans aucun doute. Et puis après? Pour un peuple qui a inventé l'industrie de l'humour, étonnante réaction que celle de dénigrer un humoriste qui fait des farces sur notre dos.

Sugar Sammy le fait pour vendre des shows. Il s'est trouvé une «niche» payante comme Martin Matte en gars parfait ou Jean-François Mercier en gros cave. Sugar fait ses choux gras de tout ce qui est plus ou moins «quétaine» au Québec et pas juste à Shawinigan. Ses fans ont compris que ce n'est pas un humoriste qui nous définit.

Un modèle d'intégration

Au lieu de vouloir sa peau, les anti Sugar Sammy devraient plutôt en faire un modèle pour ceux qui peinent à s'intégrer: «Si Sugar l'a fait, t'es capable!» dirait la pub en toutes langues.

Né à Montréal de parents venus d'Inde, il ferait un porte-parole efficace, lui qui préfère le Québec alors qu'il ferait fortune ailleurs.

On aurait avantage à faire preuve d'un peu plus d'autodérision, nous qui sommes champions pour rire des autres. Parlez-en aux Français, qui n'en peuvent plus des blagues plates des Québécois sur leur dos, mais qui ne s'en plaignent pas. C'est prouvé que c'est thérapeutique, de rire de soi. Sugar Sammy s'affiche comme «l'abominable homme de Côte des neiges». Je la trouve bonne!